Avec le beau temps vient des envies de yakitori! Mizuki nous a préparé toute la gamme des brochettes de poulet japonais, que nous avons essayé avec quelques bouteilles : un Sauvignon Blanc de Saint-Bris et un vin Corse blanc d’AOC Patrimonio, que nous testerons encore le lendemain avec des tempura. J’ai aussi versé quelques verres d’un rosé léger et d’un rouge opulent et boisé, tous deux bons marché et issus du Languedoc, afin de me faire une première impression de ces styles avec le poulet grillé.
Chaque type de brochette a été servi en version nature dit « shio« (sel), et en version « tare » recouvert d’une sauce plus sucrée. J’ai tendance à préférer le premier, mais le tare donne au plat un gout typiquement japonais, ce qui change un peu des grillades traditionnelles.
Alors, comment les vins se sont-ils tenus en compagnie de notre sélection spéciale de yakitori? Plutôt bien! Bien que les règles générales de l’accord laissent deviner certainssuccès, nous avons aussi eu quelques superbes accords inattendus, mais aussi des déceptions.
Sauvignon Blanc de Saint-Bris
Le plus léger des vins de la soirée, ce Sauvignon Blanc herbacé de la région de Chablis en Bourgogne nous a offert de belles surprises, et a aussi confirmé certaines de nos attentes. Toutefois, il n’est pas le plus versatile, car trop léger pour tenir tête à la sauce tare. Réservez-le donc aux brochettes nature (shio).
Ceci dit, deux des meilleurs accords de la soirée impliquaient ce vin. Comme prévu, l’asperge enroulée de lard était un accord parfait, avec les notes vertes du Sauvignon qui s’épanouissent en bouquet floral au contact de l’asperge, alors que la belle acidité tranche avec le gras du lard. Superbe!
Ce à quoi je m’attendais moins, c’est le très bel accord avec le tebasaki (ailes de poulet), et dans une moindre mesure, le kawa (peau de poulet). Encore une fois, l’acidité allège à merveille ces morceaux plutôt gras, avec les notes herbacées qui s’atténuent en se contentant d’offrir une couche additionnelle de complexité en fond.
Je pensais que le Saint-Bris se montrerait plus compatible avec le grand classique negima, une brochette qui alterne poulet et oignon vert japonais. L’accord était correct, mais je pense qu’un Sauvignon Blanc plus rond et corsé se révèlerait mieux, tel qu’un vin de Nouvelle-Zélande ou de Californie, voire un Pouilly-Fumé bien mûr. Un vin boisé offrirait peut-être un petit plus, et la prochaine fois, j’aimerai essayer avec un Pessac-Léognan.
Le Saint-Bris n’a pas très bien fonctionné avec le poulet simple, paraissant un peu dilué, et bien qu’il s’est mieux défendu avec le tsukune, viande hachée de poulet, il était toujours un peu bousculé. Enfin, le foie de poulet était désastreux, le vin exagérant le gout déjà prononcé du foie.
Blanc Corse de cépage Vermentino
Ce Vermentino d’Antoine Arena, issu de l’AOC Patrimonio en Corse, est un blanc corsé avec peu de boisé. Avec son fruit bien mûr et des notes miellées, je m’attendais à ce que ce blanc vedette s’accorde à merveille au yakiniku. En effet, il a montré une bonne polyvalence, mais sans pour autant offrir beaucoup d’émotions.
Le vin s’est montré à la hauteur du poulet simple et des ailes tebasaki, mais c’est avec les versions en sauce tare de ces brochettes, ainsi que le kawa (peau de poulet), que le vin a vraiment fait impression. La sauce a fait ressortir plus de fruité dans le vin, et l’accord nous a offert plus de plaisir que chaque élément seul. Très joli! Sinon, le vin a simplement accompagné chaque brochette, sans vraiment ajouter quoique ce soit au niveau des saveurs. Seules le negima avec ses oignons verts et le poulet haché tsukune ont éclipsé la finale de ce blanc relativement riche. Ce dernier nécessite peut-être un blanc plus aromatique de type Viognier ou Gewurztraminer, ou alors un rouge fruité. Sinon, le vin s’en est bien sorti avec le foie de poulet, peut-être mieux que tous les autres, sans pour autant faire des étincelles.
Rosé léger
Ce rosé de Mourvèdre du Languedoc est un Vin de Pays que j’achète en BIB de 5l box auprès d’un domaine du coin pour siroter dans le jardin. J’ai voulu l’essayer avec les yakitori, mais il semble qu’il ne soit pas forcément adapté. Bien qu’il accompagne simplement certaines brochettes, il perd vite en puissance avec certains yakitori plus gouteux. Le rosé a sans doute sa place, mais nécessite sans doute une structure plus corsée.
Rouge opulent boisé
J’ai aussi ouvert un Faugères bon marché du Languedoc pour tester un rouge plutôt riche et boisé avec le poulet. J’ai été agréablement surpris par l’accord avec le poulet simple, les notes boisées du vin se mêlant parfaitement au grillé du feu de charbon. Un très bel accord, et je pense que le boisé peut aussi apporter beaucoup aux blancs. Toutefois, l’asperge et le negima étaient en désaccord avec ce rouge, avec les arômes végétales faisant ressortir les tannins secs.
Bien que les tebasaki et le tsukune aient peu bénéficié de l’accord en tant que brochettes natures shio, la sauce tare assez sucrée a complètement changé la donne. Alors qu’avant, le rouge souffrait un peu de sa richesse excessive, la sucrosité de la sauce s’est fondu très joliment à celle du vin, faisant ressortir le fruité pendant que le boisé continuait à mettre en valeur les morceaux grillés. Un grand succès, bien qu’un fruité un peu plus frais pourrait se montrer mieux adapté au foie de poulet. La prochaine fois, je tenterai un Bourgogne ou Beaujolais boisé.